Cher lecteur, tu t’imagines peut-être que dans le boîtier de ton garde-temps, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté. Pauvre fou, tu te fourvoies, vois-tu, et je vais t’expliquer pourquoi.
Portrait des différents intervenants et diagnostic de leur santé mentale.
Portrait des différents intervenants et diagnostic de leur santé mentale.
La trotteuse
A l'image du cheval dans la fable de George Orwell, "la ferme des animaux", cette aiguille est le socle de l'appareil productif. C'est aussi la plus toquée de toute la tocante : elle est pétrie de névroses, constamment anxieuse, agitée.
En mouvement, à l’arrêt. En mouvement, à l’arrêt. Sa principale tare est due à son incapacité à choisir une direction et à s’y tenir. Cette bipolarité couplée à la vitesse à laquelle elle se déplace lui vaut le surnom de « bip bip » auprès de ses congénères. D’aucuns pourraient rétorquer que les trotteuses des montres automatiques sont plus constantes dans leur comportement. Et bien non : ce sont juste des aiguilles qui tournent au lithium.
Prolétaire des temps modernes et du temps qui passe, abrutie par la répétitivité de son quotidien, la trotteuse se cantonne à exécuter ses tâches sans avoir la moindre idée de leur utilité. Elle n'a même plus conscience de travailler. Elle est ailleurs, dans son monde, perchée.
Photo en coupe d'un boîtier de montre où l'on aperçoit une trotteuse aux prises avec son quotidien. Ce spécimen est particulièrement atteint dans son intégrité psychologique.
L’aiguille des minutes
Elle est la seule à savoir que soixante secondes font une minute et que soixante minutes font une heure. C’est donc l’intellectuelle de la bande.
L’aiguille des minutes a remarqué qu’elle faisait en une journée ce que d’autres faisaient en deux semaines, et ça la ronge. Parce qu’en plus, elle a les dents qui rayent le cadran. Elle rêve d’un putsch qui à ses yeux ne serait que justice sans jamais oser passer à l’action, et ce pour deux raisons. La première, c’est que bien souvent, elle est suisse*. La deuxième, c’est qu’elle a peur de la relégation en troisième division et des dégâts mentaux qui l’accompagnent. Car c’est uniquement quand les masses n’ont plus rien à perdre qu’elles se révoltent. Ce besoin de renverser l’ordre établi difficilement contenu par une crainte très bourgeoise de déclassement social ont précipité l’aiguille des minutes dans une profonde schizophrénie.
L’aiguille des heures
C’est une aristocrate ventripotente et consciente de ses privilèges. Oui, c’est vrai : elle met une demie journée pour faire ce que d’autres font en une heure. Et alors ? Elle, elle a des responsabilités. Et il faut bien que quelqu'un le fasse, son boulot. Elle aime répéter à qui veut bien l’entendre qu’elle est l’élément indispensable de tout ce petit monde. Ce qui n’est pas forcément vrai, d’ailleurs.
La vie oisive et étiolée qu'elle mène et la crainte permanente d'un soulèvement des classes laborieuses suscitent chez cette aiguille une paranoïa aiguë.
Tout tourne-t-il rond dans le boîtier d'une montre ? Si le petit monde qui l'habite peut sembler au premier abord paisible et harmonieux, en creusant notre étude, nous découvrons que cet équilibre n'est que la résultante de troubles plus ou moins graves à l'échelle des individus, d'où une certaine instabilité. Ainsi, notre étude a mis en exergue une société dont les rouages sont sensibles au moindre mouvement social.
La semaine prochaine, nous étudierons le refoulement des pulsions chez les touches de clavier.
*"En Italie, sous les Borgia, pendant trente ans, ce ne furent que guerres, terreur, massacres, bains de sang, et il y eut Michel-Ange, Léonard de Vinci et la Renaissance. En Suisse, cinq cents ans de démocratie, de paix, d'amour fraternel, et cela a donné quoi ? Le pendule à coucou !" Le Troisième Homme, Carol Reed.
Tout tourne-t-il rond dans le boîtier d'une montre ? Si le petit monde qui l'habite peut sembler au premier abord paisible et harmonieux, en creusant notre étude, nous découvrons que cet équilibre n'est que la résultante de troubles plus ou moins graves à l'échelle des individus, d'où une certaine instabilité. Ainsi, notre étude a mis en exergue une société dont les rouages sont sensibles au moindre mouvement social.
La semaine prochaine, nous étudierons le refoulement des pulsions chez les touches de clavier.
*"En Italie, sous les Borgia, pendant trente ans, ce ne furent que guerres, terreur, massacres, bains de sang, et il y eut Michel-Ange, Léonard de Vinci et la Renaissance. En Suisse, cinq cents ans de démocratie, de paix, d'amour fraternel, et cela a donné quoi ? Le pendule à coucou !" Le Troisième Homme, Carol Reed.
Quid du tourbillon, hiérophante garant de l'ordre et du maintien des masses laborieuses dans leur condition ? Invention maçonne s'il en est.
RépondreSupprimerCher lecteur, vous cherchez des "complications" et vous avez raison. Quid du tourbillon ? Karl Marx, qui en connaissait un rayon en psychorlogerie, a écrit à son propos qu'il était "l'opium du peuple", et de vous à moi, je ne suis pas le dernier à qui il fait tourner la tête. Après... Est-ce une invention maçonne ? Tout ce que je sais c'est qu'Abraham-Louis Breguet était sûrement plus habile avec une loupe qu'avec une truelle.
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